Quelle psychothérapie choisir ?

Idées reçue n°1 : la psychanalyse et les Thérapies comportementales sont des opposées

Lors d’un échange récent sur un réseau social, j’ai lu des commentaires qui mettaient en opposition les deux types de thérapie les plus connues : les thérapies cognitives et comportementales (TCC) et la psychanalyse.

Ces commentaires les opposaient strictement sur plusieurs points :

  • si tu veux comprendre ton problème, fais une psychanalyse, si tu veux agir sur tes symptômes, fais une Thérapie comportementale et cognitive (TCC)
  • la psychanalyse traite le passé et les TCC le présent
  • la psychanalyse dure 10 ou 20 ans, les TCC 3 mois

Je veux monter que, si les frontières entre ces deux approches étaient si rigides, on ne traiterait qu’une partie du problème en thérapie : intellectualiser d’un côté et agir de l’autre.

La réalité est plus complexe, évidemment. La psychanalyse, même si orientée vers la compréhension de ce que l’on vit, permet heureusement aussi d’agir. Le cerveau ayant besoin de sens, comprendre devient une base pour se mettre en mouvement et éventuellement, modifier les symptômes dérangeants dans le présent. Donc même si ce n’est pas l’objectif principal de cette approche, elle en a néanmoins souvent les effets indirects.

De la même façon, les Thérapies comportementales et cognitives ne se contentent pas d’être seulement orientée vers l’action et la réduction du symptômes. L’analyse fonctionnelle du patient (étape de diagnostic du fonctionnement du patient) réalisée par les thérapeutes TCC, nécessite une compréhension de certains éléments du passé du patient. Certains thérapeutes TCC travaillent même avec le transfert qui est une notion issue de la psychanalyse.

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Bref, vous l’aurez compris, les choses ne sont pas aussi noires ou blanches que ça.

La recherche nous dit aussi que dans le cas des troubles de le personnalitéla durée de thérapie est similaire entre les deux approches contrairement à ce que l’on imagine parfois. Les thérapies psychodynamiques (d’origine psychanalytiques) ne sont donc pas plus longues dans cette situation précise que les TCC pourtant désignée comme thérapies brèves (Despland J., 2010).

En conclusion : s’il y a certes des différences entre les différentes approches en thérapies, il y a aussi beaucoup de similitudes entre elles aussi.

Idée reçue n°2 : les approches scientifiques fonctionnent mieux

L’idée voudrait que certaines approches comme les TCC ou l’EMDR soient scientifiques et d’autres non. Ce n’est pas non plus aussi simple que cela.

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S’il est évidemment plus facile de faire de la recherche sur des approches qui comprennent des protocoles (autrement dit, des sortes d’étapes à traverser dans un ordre plus ou moins balisé), cela ne signifie pas que l’on ne peut pas évaluer les autres approches.

Le rapport de l’Inserm de 2004 présentait déjà un certain nombre d’éléments à ce sujet mais d’autres études ont suivi et apportent des informations intéressantes sur lefficacité des différentes approches de thérapies.

Pour donner quelques exemples :

  • Ahn & Wampold, 2001 : un processus thérapeutique ne peut pas être réduit à la simple application de procédures (donc même une approche sans procédure peut fonctionner)
  • Luborsky et al., 1999 : la croyance du thérapeute dans son approche joue un rôle important dans la réussite du traitement quelle que soit son approche (il y a donc une part importante dans le positionnement du thérapeute indépendamment de la technique utilisée !)
  • Stiles et al., 2006 : une comparaison des traitements par TCC, psychothérapie psychodynmaique et approche rogérienne a montré qu’aucune de ces approche n’a montré d’efficacité plus significative qu’une autre (cela a de quoi calmer les guerres de chapelles, isn’t it ?)

Ces différentes études montrent également que même lorsqu’il existe un protocole, certains éléments restent difficilement évaluables alors qu’ils sont une part importante de la réussite d’une thérapie : les qualités personnelles du thérapeute (donc rien à voir avec l’approche qu’il utilise), l’alliance thérapeutique (qualité de la relation entre patient et psy) et l’état psychologique du patient (idem).

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Si l’on regarde du côté des addictions par ex, il n’y a pas de différences notables entre les différentes approches : “L’étude Match (Project Match Research Group, 1997) a porté sur des patients traités de manière ambulatoire et des patients suivis en hôpital de jour sur dix sites différents. Les patients ont été attribués au hasard dans trois groupes, le premier traité par une thérapie comportementale et cognitive, le deuxième par un traitement motivationnel et le troisième par un traitement construit sur les fondements des stratégies proposées par les alcooliques anonymes (12 étapes) : (…) aucune différence significative n’a pu être mise en évidence entre ces trois formes de traitement, toutes également efficaces”.

En conclusion : toutes les approches peuvent être évaluées et il n’y a pas toujours beaucoup de différences d’efficacités entre elles.

Idées reçue n°3 : l’EMDR est la meilleure approche pour traiter les traumatismes

Comme je pratique l’EMDR, j’aurais bien envie de vous dire que cette idée n’est pas une idée reçue. Mais bien sûr, ce n’est probablement pas exactement le cas.

Oui, l’EMDR est tout à fait indiquée dans le traitement du stress post-traumatique., là dessus, il y a peu de doute possible, beaucoup d’études sont parues et en cours sur ce sujet. Mais l’EMDR n’est pas la seule approche qui permette de traiter les traumatismes. L’ICV, l’Analyse Transactionnelle, l’approche PITT et même les TCC permettent de travailler sur les traumatismes.

Certes, l’EMDR semble être plus orientée vers la recherche, mais ce que ces études nous montrent confirme également que ces autres approchent peuvent également fonctionner.

Conclusion : il semble que l’approche du psy ne soit pas le meilleur critère de choix pour son thérapeute. Mais alors, lequel est-ce ?

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Le “feeling” : le facteur principal de choix de son psy

Il existe une évidente difficulté à évaluer l’alliance thérapeutique (ce feeling avec son psy) qui correspond à la qualité de la relation entre un patient et son thérapeute. Il est en effet très compliqué de tester les différentes variables techniques d’une relation et difficile de prescrire à un praticien de développer une alliance pour le bon déroulement d’une étude. L’alliance thérapeutique est en effet la conséquence d’un processus de confiance et de sécurité entre deux personnes.

Toutefois, des études sont malgré tout réalisées et dans l’une des plus importantes à ce sujet, on apprend que l’alliance thérapeutique a un effet significatif sur le résultat clinique d’une thérapie. Cela est valable tant pour les psychothérapies qui accompagnent une prise de médicament actif (antidépresseur, anxiolytiques, antipsychotiques) que pour les thérapies qui accompagnent des prises de médicaments placebo. (National Institute of Mental Health Treatment of Depression Collaborative Research, Krupnick, 1996)

Il existe toutefois une exception à cette idée. “Si l’alliance thérapeutique apparaît être une variable extrêmement importante dans le domaine de la psychothérapie des troubles de l’humeur, des troubles anxieux et des troubles de la personnalité, son rôle paraît nettement moins évident dans le champ de la psychothérapie des addictions. Le processus semble obéir à un autre ordre de complexité, dans lequel le rôle joué par la substance doit être étudié” (Despland J., 2010).

Cette recherche et celles qui lui sont associées permettent de dire que quelle que soit l’approche choisie, une thérapie aura le plus se chance d’aboutir essentiellement si le patient se sent à la fois en sécurité et en confiance avec son thérapeute. C’est le critère de choix le plus prédictif d’efficacité connu à ce jour.

Conclusion : choisissez donc une personne plutôt qu’une approche, sauf dans le cas d’un traitement des addictions.