Comment gérez-vous vos besoins de reconnaissance ?

La reconnaissance, un besoin "honteux"

J'ai le sentiment que le besoin de reconnaissance est un besoin "mal vu". Comme si les gens qui avaient besoin de reconnaissance étaient des faibles, des narcissiques pervers ou encore des égocentriques manipulateurs qui se mettent en avant pour attirer les louanges.

Par conséquent, notre besoin de reconnaissance est parfois mis de côté, on le cache aux autres et éventuellement on se le cache aussi à soi-même, j'entends même des patients dire qu'ils en ont honte lorsqu'ils en prennent conscience.

C'est un peu problématique car c'est un besoin vital et si on ne le satisfait jamais, il y aura un manque criant en nous. Or, ce manque est néfaste pour l'estime de soi et le sentiment de valeur personnelle.

J'identifie un autre problème concomitamment : si on ne reconnait pas les besoins de reconnaissance, on prend encore moins le temps de les identifier. Et si l'on ne sait pas de quelle reconnaissance on a besoin, il est difficile de satisfaire ce besoin.

Il faut dire qu'en plus, ce n’est pas si simple car le besoin de reconnaissance peut recouvrir des tas de situations particulières et ne pas signifier pour tout le monde la même chose.

Par exemple, le besoin de reconnaissance n'est pas le besoin de valorisation. Ce n'est pas non plus le besoin de compliments ou le besoin d'être apprécié. Ou du mois, ce n'est pas que ça.

Mais alors, qu'est-ce que c'est ?

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Un besoin vital

Dans la pyramide des besoins élaborée par Maslow, on constate que le besoin de reconnaissance se trouve au niveau de l'estime de soi. Mais de mon point de vue, il se trouve à tous les niveaux.

C'est un besoin social vital traduit par l'hospitalisme : cette pathologie infantile développée par Spitz qui montre que les enfants manquant d'affection deviennent particulièrement vulnérables et potentiellement, meurent par manque de stimulations sociales.

Il entre donc en jeu partout : nécessaire pour que notre entourage satisfasse nos besoins physiologiques enfant. Puis primordial pour construire un sentiment de sécurité interne fort grâces aux relations protectrices. Le fait d'appartenir à des groupes nécessite de la reconnaissance des autres également. C'est donc un besoin primaire.

Le besoin de reconnaissance est donc un besoin que les autres nous voient et considèrent notre existence. C'est pourquoi il vaut mieux pour l'être humain une critique que l'indifférence.

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(image : https://365-jeux-en-famille.com/education-papa-dit-oui-maman-dit-non/)

Un besoin plus complexe qu'il n'y parait

Une fois qu'on accepte ce besoin à sa juste valeur, il devient possible de se demander plus précisémment : de quel type de reconnaissance est-ce que j’ai besoin précisément dans ma vie ?

Une reconnaissance des autres ?

De moi-même (estime de soi) ?

Ai-je besoin de refuser la reconnaissance négative (lorsque je suis critiqué(e)) ?

En Analyse Transactionnelle, on utilise ce qu’on appelle l’économie des strokes (terme anglais qui désigne la reconnaissance) pour répondre à ces questions.
Cette économie (la manière dont on gère les strokes) à été développée par Claude Steiner et peut se matérialiser sous la forme d’un tableau.

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Ce tableau permet d’avoir rapidement une idée de ce qu’il se passe pour nous : en bas il indique les cinq façons de gérer les signes de reconnaissance (en donner aux autres, en recevoir des autres, en demander aux autres, en refuser, s'en donner à soi-même) ; à gauche il indique que chacune de ces modalités peut être soi positive soi négative.

On peut donc donner des signes de reconnaissance, mais aussi en recevoir (beaucoup plus compliqué qu’on le pense souvent…), en demander (régulièrement difficile…), en refuser (pas toujours simple non plus) et S’EN donner à soi-même (relativement en carence chez les personnes en début de thérapie), à la fois en positif et en négatifs, à la fois en conditionnel et inconditionnel. Cela donne un grand nombre de combinaisons possibles !b

Par exemple : est-ce que je sais donner des strokes positifs ? Oui, alors je coche la case. Elle se présente sur 2 niveaux, je peux donc préciser si c’est quelque-chose que je sais très bien faire ou un tout petit peu seulement. Si j'estime que je ne sais pas le faire, je ne remplis pas la case.

Est-ce que je sais recevoir des strokes négatifs ? Non, alors je ne coche pas. Etc…

On peut voir petit à petit les endroits où des cases ne sont pas remplies. On a alors une meilleure idée de ce qu’on peut travailler et/ou à modifier pour se sentir mieux.

A quoi sert notre diagnostic de reconnaissance ?

Steiner explique que généralement, nous apprenons comment gérer la reconnaissance pendant notre éducation.

Certains savent donner de la reconnaissance positive aux autres mais ne savent pas refuser la reconnaissance négative.

D'autres savent se donner de la reconnaissance négative (critiques) mais ne savent pas en demander de la positive.

L’idée à travers le diagnostic de l'économie des strokes est de pouvoir réévaluer nos schémas d’échanges de strokes pour les modifier si besoin.

Une fois identifiées les cases que nous souhaitons intensifier, nous pouvons imaginer et noter trois comportements nouveaux à adopter pour les mettre en oeuvre.

Par exemple, si je veux augmenter ma capacité à donner des strokes positifs, je peux décider d’écrire à trois amis pour leur dire mon amitié.

Si je veux augmenter ma capacité à recevoir des strokes positifs conditionnels, je peux demander à un ami de me donner trois qualités qu’il pense que j’ai.

Si je veux augmenter ma capacité à refuser des strokes négatifs, je peux noter deux reproches que l’on m’a fait récemment et avec lesquels je ne suis pas d’accord. Éventuellement, je peux aussi verbaliser à l’autre ce désaccord.

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La reconnaissance, travail central en thérapie

J’utilise régulièrement ce tableau en thérapies de couple, car il permet de faire un état des lieux : on se rend compte des strokes qu’on obtient déjà grâce à notre économie personnelle et de ceux qui nous manquent. C’est un exercice parfois très révélateur pour les partenaires qui constatent que ce qu’ils pensent donner par exemple, n’est pas du tout reçu comme ils l’imaginaient.

L’utilisation de ce tableau ouvre donc souvent la porte à des échanges sur ce que l’on appelle le cadre de référence de chacun : la manière dont nous voyons le monde et qui peut être très différente d’une personne à l’autre, même lorsque l’on est en couple. En prendre conscience par le biais de nos économies des strokes respectives, peut faire bouger les lignes !

Pour aller plus loin dans la précision des signes de reconnaissance

L’économie des strokes recense donc cinq types de strokes (ça vaut donc le coup d’affiner sa recherche !), chacun dans une valence positive et une valence négative.

Mais elle “dit” aussi que nous pourrions avoir deux tableaux différents. Un pour y mettre les strokes inconditionnels et un pour les strokes conditionnels.

Les strokes conditionnels sont liés aux actes ou à des choses plus précises de la personne. Par ex : "je te trouve beau quand tu mets cette chemise".

Les strokes inconditionnels sont liés à la personne elle-même -> "je t’aime"/"je ne t’aime pas". Quand ils sont négatifs ("je te déteste" par ex), ils coupent la relation. C'est important d'apprendre à refuser ceux-là.

PAR EXEMPLE : je sais donner des signes de reconnaissance positifs inconditionnels (”je t’aime quoi que tu fasses”) mais je ne sais pas bien recevoir des signes de reconnaissance conditionnels (”ce que tu as fais était super chouette” ).

Je peux aussi avoir des difficultés à demander des strokes positifs conditionnels (“penses tu que ma façon de faire ici est bonne ?”) mais facilement refuser des strokes négatifs inconditionnels (ne pas donner de crédit à quelqu’un qui me dirait “tu es nulle !”).

Steiner a écrit un conte pour enfant au sujet de l’Economie des strokes. Les signes de reconnaissance sont appelé les chaudouxdoux et il raconte ce qu’ils se passe quand ils viennent à manquer et comment faire pour en retrouver… !

C’est très mignon et ça permet une première approche des modes relationnels qu’on met en place dans nos vies. Vous pouvez d'ailleurs aller voir la très chouette vidéo d'Axel Noverraz sur ce conte !

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Alors, et vous, quels sont vos strokes les plus faciles ? Et les plus difficiles ? 🙂

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